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13 mars 2018

Me Marc-Antoine Bordeleau

Avocat

La défense d’intoxication est un moyen de défense qui permet à une personne, qui est intoxiquée par l’alcool ou une drogue, d’invoquer devant un juge qu’elle était à ce point intoxiquée qu’elle ne pouvait avoir l’intention mentale de commettre l’infraction ou, dans de rares cas, qu’elle n’avait plus le contrôle physique de son corps lorsqu’elle l’a commise. Une telle défense présentée avec succès devant une Cour de justice permet d’obtenir un acquittement.

Les tribunaux ont déterminé qu’il y a 3 degrés d’intoxication, soit l’intoxication légère, l’intoxication avancée et l’intoxication extrême.

Il importe, tout d’abord, de rappeler que la tolérance à l’alcool ou à la drogue diffère d’une personne à l’autre et que nous ne pouvons mettre un chiffre exact de consommations correspondant à chaque degré d’intoxication. Il s’agit d’une question de fait qui varie d’un cas à l’autre.

L’intoxication légère correspond normalement à un simple relâchement des inhibitions. L’exemple le plus fréquent est la consommation que l’on prend durant un 5 à 7. Cette intoxication ne constituera jamais une défense. Cette faible intoxication ne permet pas de faire acquitter un accusé.

Ensuite, il y a l’intoxication avancée. Ce degré d’intoxication est de loin supérieur au précédent. Il vous permet de vous défendre à l’encontre d’une infraction d’intention spécifique.

Qu’est-ce qu’une infraction d’intention spécifique? Ce concept est en opposition à celui d’infraction d’intention générale. Les crimes d’intention générale sont des crimes pour lesquels on n’a pas à prouver une intention morale précise, un raisonnement intellectuel complexe. Par exemple, les crimes de voies de fait sont des crimes d’intention générale. Il faut seulement prouver que l’accusé a employé la force contre une autre personne sans son consentement. Les crimes d’intention spécifique, quant à eux, requièrent une intention cachée dans l’accomplissement du geste délictuel, un raisonnement plus poussé et un état d’esprit plus blâmable. Par exemple, l’infraction de meurtre est un crime d’intention spécifique puisque la personne commet un certain geste dans l’intention de causer la mort à l’autre personne. Ainsi, une personne intoxiquée de façon avancée pourrait invoquer une défense à l’encontre de l’infraction de meurtre puisqu’on suppose qu’une personne ne peut normalement avoir un état d’esprit à ce point blâmable pour commettre ladite infraction.

Enfin, il y a l’intoxication extrême, qui n’apparaît que dans de rares cas. Ce degré d’intoxication fait en sorte que la personne est tellement intoxiquée qu’elle n’arrive plus à contrôler son propre corps. Les tribunaux estiment que cette intoxication s’apparente au somnambulisme en raison du fait que les gestes de la personne ne sont plus volontaires au sens physique.

Par ailleurs, le gouvernement a, en 1995, fait certaines modifications au Code criminel en ajoutant l’article 33.1. Cet article mentionne qu’une défense d’intoxication volontaire, qu’elle soit avancée ou extrême, ne pouvait servir de défense à une infraction d’intention générale lorsque l’infraction en cause implique une atteinte ou une menace d’atteinte à l’intégrité physique d’une personne. Ce moyen de défense est donc exclu pour certains types de crimes, comme les voies de fait.

Il faut cependant se rappeler que la règle prévue à l’article 33.1 C.cr. s’applique seulement à la défense d’intoxication volontaire. Une personne qui serait intoxiquée de façon involontaire, soit parce qu’on l’a droguée à son insu ou parce qu’elle a été exposée à des évaporations toxiques dont elle ignorait les effets, et qui commettrait une infraction en raison de cet état d’intoxication, devrait être excusée de toute responsabilité criminelle, sans égard à l’intention requise pour commettre le crime. On ne pourrait pas trouver une personne coupable d’une infraction alors que celle-ci n’a aucunement décidé de se mettre dans un tel état d’intoxication.

En conclusion, la défense d’intoxication permet parfois d’être acquitté d’une infraction, mais elle doit obéir à certaines exigences et certaines modalités d’application. N’hésitez pas à venir nous rencontrer si vous croyez qu’une telle défense peut être soulevée dans votre dossier.


Au plaisir de vous conseiller,

Marc-Antoine Bordeleau, avocat